jeudi 30 mai 2013

[Afrique/Côte d'Ivoire] Pr Mamadou Koulibaly : "Que les élites africaines cessent de croire qu'il faut avoir des entrées à l'Elysée pour être élu président"



Mamadou Koulibaly : "Que les élites africaines cessent de croire qu'il faut avoir des entrées à l'Elysée pour être élu président"
par LIDER - Liberté et Démocratie pour la République (CI) (Articles), mardi 28 mai 2013, 19:35
Mamadou Koulibaly, président de LIDER dans le quotidien camerounais Mutations:

«Que les élites africaines cessent de croire qu’il faut avoir des entrées au Quai d’Orsay ou à l’Elysée pour être élu président en Afrique.»

Homme politique, universitaire, idéologue, en visite au Cameroun, l’ancien président de l’Assemblée nationale de Côte d’Ivoire et actuel président de LIDER (Liberté et Démocratie pour la République), parti politique qu’il a fondé le 14 juillet 2011, nous livre sa vision de l’Afrique et de la Côte d’Ivoire.
Par Boris Berlolt | Mutations | 28 mai 2013

Quelles sont les raisons de votre visite au Cameroun ?

J’ai constaté qu’il y a à nouveau de la croissance économique dans les pays africains après une période de crise qui a fait croire que l’on était perdu. Cette croissance a repris, notamment grâce à la part très importante que les Chinois jouent dans l’économie africaine. Cependant, il s’agit d’une croissance principalement fondée sur l’exploitation des ressources naturelles, ce qui était déjà le cas dans les années 60, au sortir des indépendances. Il faut éviter que l’on s’achemine vers des croissances appauvrissantes. C’est la raison pour laquelle j’ai été invité par la Fondation Paul Ango Ela, afin que l’on puisse discuter de la notion d’émergence. La question fondamentale est celle de savoir qu’est-ce que l’émergence et comment faire pour que l’émergence ne soit plus un leurre que les gouvernants font souvent miroiter à leurs populations alors que dans les faits, ils s’en éloignent un peu plus chaque jour. L’émergence ne se décrète pas. Il y a un cadre, des institutions, des mécanismes qui font que des pays deviennent sans contestation possible des économies de marchés émergents.

Que penser dès lors des chiffres ?

Je ne suis pas impressionné par les chiffres qui parlent de croissance, dans la mesure où il s’agit d’une croissance appauvrissante. La source de ces chiffres ne se trouve ni au niveau des entreprises, ni au niveau de la consommation des ménages, mais plutôt au niveau du budget de l’Etat, qui est financé par l’aide publique au développement et l’exportation des matières premières qui augmentent le produit intérieur brut des Etats. Cependant, parallèlement, alors que les chiffres de la croissance sont en hausse, les populations deviennent chaque jour un peu plus pauvres, parce qu’il n’y a pas de création d’emploi et le taux d’épargne dans les différents pays baisse. C’est dangereux parce que les jeunes et les populations qui sont affectées par le chômage et la pauvreté ont le sentiment que les ressources sont détournées.

S’agissant des chiffres, on parle effectivement d’une croissance de plus de 8% en Côte d’Ivoire. Qu’en est-il effectivement ?

Si on regarde les chiffres, les performances sont réelles. Mon problème, c’est que la croissance ne peut conduire à l’industrialisation ou à l’émergence que si elle arrive à faire émerger des économies marchés, de l’entreprenariat direct. Sinon, si comme cela est le cas en Côte d’Ivoire, l’action n’est soutenue que par l’Etat, on a des Etats riches et des peuples pauvres. Une situation qui peut aboutir à des conflits à tout moment.

Vous dites donc que vous ne croyez pas en la croissance qui est brandie, dont certains médias font grand écho avec l’objectif caché de présenter un autre visage du pouvoir Ouattara ?

Je maintiens et je répète que le chiffre de 8,9% n’est pas faux. Ce qui m’intrigue, c’est que quand on dit qu’un pays fait de la croissance, c’est sur le Pib que cela se calcule. Ce qui est curieux c’est qu’en Côte d’Ivoire, avant que les entreprises qui sont au cœur du calcul de ce Pib n’aient déclaré officiellement leurs valeurs ajoutées, le gouvernement a déjà donné le Pib. C’est ce qui est louche dans le chiffre actuel. L’on fait croire qu’il y a croissance, alors que l’on n’est pas en possession des chiffres qui permettent le calcul de cette même croissance. Un second élément et pas des moindres, est que cette croissance se fait parallèlement avec l’augmentation de la pauvreté. Tenez. L’institut national de la statistique (Ins) a corroboré les chiffres du bureau international du travail (Bit) qui indiquent que le chômage a augmenté pour atteindre maintenant plus de 4 millions de personnes en Côte d’Ivoire. C’est dire que notre croissance crée des chômeurs. L’on constate également aisément la baisse du niveau de vie et du pouvoir d’achat des ménages, qui sont obligés de casser leur épargne pour joindre les deux bouts.

Est-ce à dire que la situation n’a pas beaucoup évolué au-delà des déclarations du Fonds monétaire international sur le décollage économique de la Côte d’Ivoire ?

En fait, la crise post électorale avait simplement fait chuter l’économie qui commençait à se relever depuis la tentative de coup d’Etat de septembre 2002. Nous sommes en train d’atteindre aujourd’hui le niveau de 2009. Lorsqu’on s’assied et l’on regarde les chiffres par rapport à 2010 et 2011, on voit une augmentation. Mais, quand on les compare avec ceux de 2009, c'est-à-dire sous Laurent Gbagbo, on est au même niveau. Pour résumer notre situation, il s’agit d’un pays malade, tombé en chute libre qui se relève progressivement.

Laurent Gbagbo est la Cour pénale internationale depuis bientôt deux ans, est ce que vous lui avez rendu visite ?

Non, et je ne pense pas qu’il l’ait sollicité. Nous ne sommes plus en contact.

Comment expliquez cela, vous qui avez été l’un de ses plus proches collaborateurs et un idéologue du Front populaire ivoirien (Fpi) ?

J’ai été chassé du Fpi. Alors que j’en étais le président intérimaire et que je cherchais à remobiliser les troupes en restructurant la machine et procédant à un bilan, afin de ne plus répéter les erreurs qui nous avaient conduits dans le mur, l’on m’a fait savoir qu’ «on n’attache pas bagages avec Dioula» et que je n’avais pas le droit de reformater le parti pour en faire une force d’opposition debout contre Ouattara tant que Gbagbo était en prison. Les dirigeants du Fpi ont choisi de s’enfermer dans leur sectarisme et de ne rien faire tant que Gbagbo n’est pas libéré. Je leur ai expliqué qu’on ne savait combien de temps il resterait en prison, j’ai pris l’exemple de l’Afrique du Sud, en leur disant que si l’Anc avait attendu la libération de Mandela pour se restructurer et continuer le combat, ils se seraient assis sur leurs talons pendant au moins 27 ans. Je leur ai démontré qu’il fallait que nous nous remobilisions par cercles concentriques, parce que c’était nos actions qui allaient permettre de faire libérer nos camarades, et que ce n’était pas à ceux qui étaient enfermés à Korhogo, Bouna, Boundiali de venir nous sauver, mais plutôt le contraire, mais l’on m’a répondu qu’ «en l’absence du créateur, on ne touche pas à la créature». Moi, je n’ai pas l’habitude de rester les bras ballants face à l’adversité. Je trouve les actions entreprises par le nouveau régime en Côte d’Ivoire trop destructrices pour laisser Ouattara sans opposition et sans contrepouvoir fort en face de lui. J’ai crée le parti LIDER et depuis, nous avons repris le flambeau de la lutte pour un retour à l’état de droit, pour réconcilier les populations, pour critiquer le gouvernement quand il déraille ou est dans l’erreur, pour exposer ses mensonges institutionnels et pour proposer des alternatives efficaces aux Ivoiriens.

Que pensez-vous du régime Gbagbo ?

C’est dommage. Il y a des choses que beaucoup de gens ne savent pas. Le Fpi a gouverné, mais n’a pas gouverné seul. Pendant dix ans, Gbagbo était sur le fauteuil et Ouattara gouvernait. C’est cela qui est la vérité. Le Fpi n’a jamais géré la Côte d’Ivoire seul. En 2002, Alassane Ouattara, qui n’était pas d’accord avec les résultats de l’élection présidentielle et les résultats des législatives et municipales, a crée la rébellion. Après les différents accords signés depuis Marcoussis jusqu’à Ouagadougou en passant par Lomé, Accra, Pretoria, des ministres du rassemblement des républicains (Rdr) d’Alassane Ouattara et du parti démocratique de Côte d’ Ivoire (Pdci) sont entrés au gouvernement, ainsi que des rebelles. Et chacun ne répondait qu’à sa hiérarchie politique. Après la guerre, tous les chefs rebelles ont d’ailleurs été nommés, soit dans l’armée, soit dans le corps préfectoral. Ouattara  a partagé le pays parce que les anciens rebelles l’exigeaient. Ce n’est plus un secret, c’est lui qui a fait la tentative de coup d’Etat en 2002 puis qui a organisé la rébellion. La Côte d’Ivoire a été partagée comme un gâteau. Tout ce que la Côte d’Ivoire a fait entre 2002 et 2010, c’était tout ce que Ouattara voulait.

Dès lors, vous étiez la deuxième personnalité du pays, en tant que président de l’Assemblée nationale, pourquoi vous n’avez rien fait ?

Dans les régimes présidentiels, il n’y a pas de numéro 2 du régime. Le décompte commence au numéro un et s’arrête au numéro 1. Seul le président de la République décide, le parlement n’a qu’un rôle protocolaire. Cependant, j’ai refusé de plier dès Marcoussis, mais Gbagbo a dit que c’était un médicament amer qu’il fallait l’ingurgiter pour avoir la paix. Malheureusement, Gbagbo a laissé faire tout et n’importe quoi, parce qu’il pensait que c’était le meilleur moyen de montrer sa bonne foi. L’aile lucide du parti, dont j’étais le chef de file, a été présentée comme l’aile dure et mise ainsi à l’écart. A chaque fois que je me suis opposé, certains cadres du parti allaient dire que je ne voulais pas la paix ou que je contestais son autorité. Gbagbo gouvernait par ordonnances, comme Ouattara aujourd’hui. Le résultat c’est que non seulement il n’a pas eu la paix, mais, aujourd’hui, il est en prison, laissant le pays dans le chaos, l’incertitude, entre les griffes des différentes mafias qui ont gangréné l’Etat. Nous savions depuis longtemps que c’était Ouattara qui avait réellement le pouvoir. Le Rdr est au pouvoir depuis dix ans. Ses ministres ne répondaient que de lui.

De manière concrète, quels étaient vos rapports avec l’ancien président, Laurent Gbagbo ?

A la fin du règne, il y avait quelques incompréhensions liées à la manière dont le pays était gouverné. Les tensions sont véritablement apparues lorsque j’ai compris qu’il y avait une sorte de laissez-allez au sein du parti. Certains cadres avaient des pratiques qui étaient peu conformes à l’éthique. Nominations dans les administrations, parrainage de leurs enfants dans les grandes écoles, corruption. Lorsque j’ai essayé d’en parler, l’on m’a menacé.

Est-ce que vous en voulez à Laurent Gbagbo ?

Non. Je ne saurais lui en vouloir. Je regrette simplement que nous n’ayons pas réalisé les rêves que nous avions partagés avec les jeunes Ivoiriens et les jeunes Africains. C’est ce qui m’embarrasse le plus. Cela peut laisser penser que nous avons embarqué des gens dans une aventure dont nous ne maîtrisions pas l’issue.

Est-ce que vous aviez les moyens ?

Oui, nous avions les moyens. Le budget de l’Etat était en augmentation chaque année depuis 2002. Cela veut dire qu’il y avait de l’argent dans les caisses et nous aurions pu réaliser nos ambitions. J’ai proposé dès le début de la crise que nous puissions définir une politique tel que ce fût le cas entre Berlin-Ouest et Berlin-Est. C'est-à-dire, comme la Côte d’Ivoire était divisée entre le Nord sous contrôle rebelle et le Sud sous contrôle gouvernemental, il était important que nous puissions massivement investir au Sud, dans l’amélioration des conditions de vie des citoyens, la promotion des droits de l’homme, l’amélioration des infrastructures, de telle sorte que les citoyens du Nord puissent être envieux à l’égard des citoyens du Sud. Si nous avions travaillé dans ce sens, nous aurions gagné en légitimité. Mais rien n’a été fait. La primature et la présidence étaient en rivalité pour savoir qui allait gaspiller le plus. Nos chantiers ont été abandonnés, pendant que les hommes du système s’enrichissaient et faisaient perdurer la crise plus que nécessaire.

Vous aviez l’argent, vous aviez des ambitions. Qu’est-ce qui a donc causé problème ?

Plusieurs partis politiques, entre autre le Rdr, le Fpi et le Pdci participaient au gouvernement.  Leurs principaux objectifs à chacun étaient de gérer des portefeuilles et rien d’autre.  Cette situation avait été voulue par l’accord de Marcoussis, qui portait atteinte à la souveraineté de la Côte d’Ivoire. Je l’ai rejeté et j’avais dit qu’il fallait mettre les rebelles à leur place de rebelles. L’on ne m’a pas écouté. Par la suite, l’Etat a été transformé en Etat néo-patrimonial, que les différentes formations et acteurs politiques géraient au mieux de leurs intérêts personnels, familiaux et claniques. Le programme de gouvernement pour lequel nous avions été élus en 2000 n’intéressait plus personne, même pas au sein du Fpi où les quelques irréductibles qui tentaient de rappeler leurs camarades à l’ordre étaient sommés de se taire ou faisaient office de trouble-fêtes.

S’agissant de la crise post-électorale, des zones d’ombres persistent sur un ensemble d’éléments ?

Il n’y a pas vraiment de zones d’ombre. Le président Gbagbo a cédé son pouvoir lorsqu’il a piétiné le travail effectué par l’Assemblée nationale depuis Marcoussis en signant les accords de Pretoria. C’était une énorme erreur tactique, d’autant plus que la médiation du président Thabo Mbeki aurait dû nous inciter à plus de prudence. Nous étions divisés sur la méthodologie qu’il utilisait. Le président Mbeki nous a dit : «Donnez tout ce que vous pouvez, acceptez tout et puis après, j’en fais mon affaire». Je n’étais pas pour cette approche. Je préconisais plutôt le donnant-donnant : les rebelles font un geste, l’Etat fait un geste. Mais nous avons suivi le médiateur sud-africain, et lorsque que l’Etat a tout accepté et tout donné, les rebelles ont envoyé valser M. Mbeki sans que celui-ci ne frappe du poing sur la table ou n’use de tous ses pouvoirs pour leur faire tenir leurs engagements. Il s’est laissé éjecter du processus sans un mot, après avoir tout obtenu de l’Etat de Côte d’Ivoire et rien obtenu des rebelles. A cela s’ajoute le fait que Gbagbo ait refusé de porter plainte contre la France après les événements de novembre 2004 et qu’il ait accepté d’aller aux élections sans désarmement préalable, alors que cela était clairement stipulé dans l’accord de Ouaga. Il a commis une succession des fautes graves et n’a pas tiré les leçons de celles qui précédaient.

A-t-il gagné les élections ?

Je ne suis pas le juge des élections. Mais si je ne m’en tiens qu’au résultat, je dirais non. Gbagbo a lui-même, une nouvelle fois, mis la Constitution ivoirienne de côté pour faire appel à un panel de chefs d’Etat africains afin de trancher la question de la victoire électorale. Il a indiqué que la décision de ce panel s’imposerait à tous et que si le panel déclarait qu’il avait perdu, il quitterait le pouvoir. Et le panel a conclu qu’il a perdu les élections.

Quel est le rôle de la France et de l’Onu dans la guerre en Côte d’Ivoire ?

Le France a joué le rôle qu’on lui a donné dans la crise ivoirienne. J’ai toujours dit à mes camarades qu’ils ne peuvent pas dire «oui» à chacune des étapes et venir dire «non» à la fin. En acceptant les accords honteux de Marcoussis, nous nous sommes engagés dans un tunnel avec une seule issue possible. J’ai claqué la porte de Marcoussis parce qu’il m’était intolérable de voir M. Mazeaud, alors président du conseil constitutionnel français, mettre des rebelles sur un pied d’égalité avec l’Etat de Côte d’Ivoire. En novembre 2004, j’ai préparé l’opération Dignité et lorsqu’avec nos hommes, nous avions mis en déroute la rébellion et exposé la forfaiture de la France à la face du monde après que 63 civils ivoiriens aux mains nues aient été tués par la force Licorne, Gbagbo a catégoriquement refusé de mettre un terme à la crise en portant plainte contre la France à la Cour Internationale de Justice, préférant plutôt faire l’apologie de l’armée française en soulignant à tout va son action positive. Gbagbo Laurent a été le meilleur défenseur de la France dans la crise ivoirienne. Il a tout donné aux Français. Il a renouvelé les concessions de l’eau et de l’électricité à son ami Martin Bouygues, de gré à gré. Pareil pour la téléphonie, qu’il a redonnée hors toute procédure légale à France Télecoms. Il a offert le terminal à conteneurs du port d’Abidjan à Bolloré, sans appel d’offres. Il a offert la construction des chantiers de Yamoussoukro à Fakhoury, en allant même jusqu’à lui donner des puits de pétrole. Malgré toutes nos mises en garde, il a confié l’élaboration et la gestion du fichier électoral à la Sagem. Sa campagne a été conçue et gérée par Stéphane Fouks, d’Euro RSCG. Un de ses principaux financiers était Bolloré. Il a confié ses sondages à la Sofres, entreprise française. Entre les deux tours, Gbagbo s’est même empressé d’octroyer des blocs pétroliers à la frontière du Ghana au groupe Total, comme ça, cadeau. Dans son livre de campagne de 2010, il fait l’apologie du franc Cfa, allant même jusqu’à écrire que s’il gagne les élections, il ira convaincre le Ghana, le Nigeria etc. de rejoindre la zone franc. Alors, une fois qu’on a fait tout cela, peut-on vraiment s’offusquer de l’ingérence française en Côte d’Ivoire ? Gbagbo a offert la Côte d’Ivoire à la France.

Que pensez-vous du franc Cfa aujourd’hui ?

Le franc Cfa est une monnaie inique, hier comme aujourd’hui. Toutes les économies de marchés émergents ont leurs propres monnaies et sont connectées au reste du monde par des taux de change flexibles. Tant que nous ne romprons pas avec le Cfa et ses mécanismes protectionnistes qui ne bénéficient qu’à la France, nous n’aurons ni prospérité, ni émergence. Je crois qu’au Cameroun, les gens commencent à bien comprendre à quel point cette monnaie est malsaine. Chaque fois qu’un pays de la zone franc vend quelque chose, la moitié des recettes est placée sur un compte d’opération auprès du Trésor français, dont la gestion est des plus opaques. C’est la France qui gèrent nos avoirs, qui définit à quel taux d’intérêt elle veut bien les rémunérer et qui est la seule à savoir combien nous avons réellement dans ses comptes, nos chefs d’Etat eux-mêmes ne le sachant pas de façon fiable. Par ailleurs, tant que nous restons emprisonnés dans cette monnaie, nous serons cantonnés à la marge du commerce international, parce que nos prix sont alignés sur l’euro fort, alors que les autres vendeurs, qui ont une monnaie souveraine, peuvent se montrer beaucoup plus compétitifs en adaptant le taux de change de leur monnaie en toute flexibilité.

Comparativement à Nicolas Sarkozy, la politique africaine de François Hollande a-t-elle changé ?

La politique africaine de la France m’importe peu. Ce n’est pas sur elle que nous devons travailler, mais sur nous-mêmes. Les anciens, comme Um Nyobé, Félix Moumié ou même Houphouët-Boigny, ont mené le combat de l’indépendance vis-à-vis des colons. Mais nous avons jubilé trop tôt et oublié ensuite de nous émanciper de nos Etats. Regardez la question de la terre. Quand les colons sont arrivés en Afrique, ils ont arraché la terre à nos aïeux. Puis, au moment des indépendances, au lieu de rendre la terre à ses propriétaires initiaux, ils ont préféré la donner à l’Etat, sachant bien qu’il leur suffisait de contrôler celui qui est à la tête de l’Etat pour continuer de posséder la terre. Et nos chefs d’Etat successifs refusent de changer quelque chose à cela, tout contents qu’ils sont d’être les interlocuteurs «privilégiés» de la France. Et les populations acceptent cela, concentrant leurs rancœurs contre les puissances coloniales, alors que ce sont leurs Etats qui les aliènent aujourd’hui. Il faut faire pression sur nos gouvernants pour que les Etats rendent la terre aux paysans. En ville, on peut avoir des titres fonciers, mais en zones rurales, c’est la croix et la bannière. Le sol appartient, de façon tout à fait illégitime, à l’Etat, le sous-sol aussi. Pourquoi ? Que les Etats africains rendent les terres à leurs propriétaires légitimes, qu’ils distribuent les titres fonciers pour les sols et les sous sols aux paysans et nous verrons non seulement la prospérité arriver, mais également la pression géostratégique autour de nos ressources naturelles diminuer. En effet, aujourd’hui, il suffit à la France de contrôler le président africain pour contrôler les richesses du pays. Mais si nous réformons le foncier, si nous faisons le cadastrage de nos territoires et distribuons les titres fonciers aux paysans, alors l’Etat français n’aura plus la mainmise sur nous, parce qu’il lui faudrait contrôler séparément des centaines de milliers d’individus, ce qui est impossible. Alors nous verrons, comme cela se fait partout ailleurs où ça fonctionne bien, des particuliers négocier avec des particuliers, au lieu de voir des Etats dealer avec des Etats. Nos paysans pourront vendre ou louer leurs terres, entrer dans le marché hypothécaire, emprunter, investir, devenir riches, créer des emplois. Ils seront devenus propriétaires, et la base de la prospérité, c’est la propriété individuelle.

Quelles leçons faut-il de tirer tout cela?

Il faut que les élites africaines cessent de croire qu’il faut avoir des entrées au Quai d’Orsay ou à l’Elysée pour être élu président en Afrique. C’est dans les peuples d’Afrique qu’elles doivent fonder le cœur de leur pouvoir. Respectons nos peuples. Libérons-les et responsabilisons-les.
Pr Mamadou Koulibaly en interview avec Mutations à l'hôtel Hilton de Yaoundé

lundi 27 mai 2013

[Afrique / Cote d'Ivoire] La Secrétaire Générale Adjointe d'Africa Human Voice International (AHVI) s'en est allée...


AFRICA HUMAN VOICE
INTERNATIONAL (AHVI)
http://ahv-news.blogspot.com


DECES DE MADEMOISELLE BEATRICE ZAHOURA
Secrétaire Générale Adjointe d'AHVI


ELLE A ETE DE TOUS LES COMBATS


AFRICA HUMAN VOICE INTERNATIONAL (AHVI) vient d’apprendre avec stupéfaction le décès, à Abidjan, en République de côte d’Ivoire, à la suite d’une longue maladie, de sa Secrétaire Générale Adjointe chargée de la Fédération Afrique, Mademoiselle Béatrice ZAHOURA.

Elle a été de tous les combats tant au niveau intérieur, national, qu’international. Tout en étant Secrétaire Générale Adjointe de AHVI, mademoiselle ZAHOURA Béatrice a aussi été Présidente des Sentinelles sous le Président Laurent Gbagbo. Son abnégation n’était plus à démontrer. Volontaire, disposée et disponible, elle a donné à toutes et tous tout ce qu’elle avait d’humain dans le strict respect et la promotion des Droits de l’Homme.

AHVI partage la tristesse de toute la famille et lui adresse ses condoléances les plus attristées.
Que le Seigneur Dieu Tout Puissant la reçoive en son sein et lui accorde la Paix éternelle.

Jean-Claude Mayima-Mbemba
Secrétaire Général de AHVI

samedi 4 mai 2013

Afrique : L'entrée fracassante du Rwanda sur les marchés financiers

L’entrée fracassante du Rwanda sur les marchés financiers

(Africa Diligence) 3,5 milliards de dollars US pour 250 participants. S’il ne fallait retenir qu’une chose de la première émission de bons du trésor rwandais, ce sont bien ces chiffres astronomiques à l’échelle du pays des mille collines. Une entrée fracassante.
Le gouvernement rwandais qui n’en attendait pas tant s’est saisi de l’occasion pour se féliciter et souligner que cette réussite était le fruit d’un travail de  longue haleine, un travail qu’il estime justement reconnu par la communauté internationale financière. Retour sur le premier emprunt obligataire de Kigali.
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Un emprunt obligataire, pourquoi? Comment?
Depuis une dizaine d’années, le Rwanda est cité comme un modèle de développement en Afrique. Les institutions financières internationales (FMI, Banque Mondiale, Banque Africaine de Développement…) et autres bailleurs de fonds internationaux mettent principalement en avant sa forte croissance – plus de 8% entre 2003 et 2011 d’après la Banque Mondiale -  et son usage efficace de la manne financière provenant de l’aide – 3ème pays africain le moins corrompu, 49ème mondial en 2011 d’après Transparency International.
Cette bonne réputation lui assure des prêts importants et un traitement privilégié de la part de ces mêmes acteurs économiques internationaux. C’est ainsi qu’en 2005 le club de Paris – un groupe informel de pays créanciers – a annulé 100% de ses créances rwandaises soit 100 millions de dollars. C’est aussi sur ces mêmes fondements qu’environ 35% du budget 2012-2013 – environ 770 millions de dollars – est financé par des contributions externes.
Dernièrement, le gouvernement rwandais était en passe de réussir sa stratégie. Celle- ci consistait à rendre le budget national de moins en moins tributaire des ressources externes en profitant de l’aide internationale pour réaliser des investissements structurels afin de dynamiser la croissance et d’accroître les sources de revenus internes pour l’Etat.
Néanmoins, le rapport des Nations Unies sur le possible soutien du Rwanda à la rébellion dans l’est de la République Démocratique du Congo a changé la donne. En effet, sous la pression internationale, de nombreux pays ont suspendu leur financement du Rwanda. L’effet sur la réalisation des grands projets fut immédiat. Le «Kigali Convention Center» qui devait être inauguré au courant de l’année 2012 a pris un coup d’arrêt. Il en va de même pour certains projets de développement urbain présent dans le «Kigali Master Plan». Tous ces retards étant préjudiciables en terme d’image mais également financièrement, le gouvernement rwandais fut dans l’obligation de trouver de nouveaux moyens de financement.
Le fond «Agaciro» naît de cet impératif. Toutefois, il s’agit plus d’un outil de communication que d’un outil de planification stratégique. En effet, un Etat ne peut compter sur ses ressortissants pour s’acquitter de leur devoir fiscal et, en sus, participer à un système certes patriotique mais qui peut être perçu comme une double imposition. Le fait de recourir au marché financier est plus conforme aux standards étatiques habituels d’autant plus que le Rwanda bénéficie d’une bonne réputation économique.
C’est ainsi que le Rwanda a décidé de se lance dans la grande aventure de financement par le marché. Pour cela deux banques – BNP Paribas et Citibank- sont mandatées, elles conduiront l’opération d’emprunt. Concrètement le Rwanda annonce émettre des bons obligataires à échéance de mai 2023 et d’une valeur totale de 400 millions de dollars US (environ 300 millions d’euros) à un  taux de 6,875 %. Les agences de notation Standard and Poor’s et Fitch donnent la note de B avec une perspective stable à la dette rwandaise ce qui fait d’elle un placement spéculatif.  Les officiels rwandais, le gouverneur de la Banque Nationale du Rwanda et le ministre de l’Economie et des Finances en tête, se transforment en commerciaux et font la promotion de l’événement. Des investisseurs sont rencontrés aux quatres coins du globe. Boston, Frankfurt, London, Los Angeles, Munich, Hong Kong, New York et Singapore sont cités par le ministère de l’Economie et des Finances.
L’emprunt obligataire, une réussite et après?
Le gouvernement rwandais voulait recueillir 400 millions de dollars US, le marché était prêt à lui en donner 3,5 milliards soit plus de 50% du PIB national. Les experts prédisaient un taux d’intérêt entre 6,875 et 7%, le gouvernement rwandais a obtenu 6,625. Le succès est total.
Avec ces fonds, le gouvernement annonce que 80 millions vont servir à refinancer la dette commerciale de la compagnie aérienne RwandAir, 120 millions payeront la dette due pour le «Kigali Convention Center», 150 millions serviront à terminer la construction de ce même centre alors que 50 millions seront alloués à la construction d’une centrale hydro-électrique à la rivière Nyabarongo d’une capacité de 28 megawatts.
Ce qui est inquiétant avec cet emprunt c’est que 50% de son montant va servir à payer des dettes. Nul besoin d’être un expert en finances publiques pour voir le système périlleux qui risque de s’installer lorsque qu’un Etat s’endette pour se désendetter. Bien que le niveau de la dette publique rwandaise – 22% avant l’emprunt obligataire – n’ait pas atteint un seuil alarmant, la relative facilité à récolter des fonds via les marchés financiers pourrait devenir un engrenage dangereux pour un pays en pleine construction économique.
Aussi ce qui parait dommageable c’est de voir que l’investissement le plus pertinent est celui doté de la plus faible participation financière. Quand on sait que le Rwanda a une balance commerciale négative (importations supérieurs aux exportations) et que cela provient en partie de sa dépendance au pétrole, première source d’alimentation des centrales électriques, toute initiative visant à accroître l’usage des ressources propres ne peut qu’être saluée. Pourquoi ne pas multiplier ces initiatives étant donné qu’un bon emprunt est celui qui prépare l’avenir? Compte tenu des besoins du Rwanda en termes d’infrastructures primaires, quel est le lien entre ces dernières et l’emprunt?
M. Gatete, Ministre de l’Economie et des Finances, a déjà annoncé que le Rwanda se réserve le droit de retourner sur les marchés financiers lorsqu’il y aura d’autres projets qui le nécessitent. Après le goût délicieux d’un succès retentissant, gare à l’arrière-gout qui risque d’être amère tant cet emprunt semble remplacer un mal par un autre.

 Boniface DUVAL

SOURCE :

 

vendredi 3 mai 2013

[AFRIQUE/MONDE] Peu-ton s'inspirer de la Chine en matière de reéduction des risques

PÉKIN, 2 mai 2013 (IRIN) - La Chine, qui est exposée chaque année à presque toutes les catastrophes naturelles existantes - notamment les tremblements de terre, les inondations, les cyclones et les glissements de terrain -
prend la bonne direction en termes de réduction des risques de catastrophes (RRC), d'après les experts.

« La Chine a su tirer les enseignements de ces nombreuses années jalonnées de lourdes pertes humaines et économiques, et sait combien il est important de maintenir les pertes à un niveau annuel acceptable afin d'assurer le développement économique et social du pays. La Chine tente aujourd'hui de ne pas dépasser 1,5 pour cent du PIB en termes de pertes dues aux catastrophes », a déclaré à IRIN le 29 avril Margareta Wahlström, représentante spéciale du secrétaire général des Nations Unies pour la RRC. C'est le premier gouvernement du monde à annoncer publiquement cette démarche et nous espérons que d'autres vont suivre cet exemple ».

« Le gouvernement chinois est conscient de l'importance de la RRC et de l'intervention » a renchéri Karen Poon, coordinatrice des opérations de l'unité de gestion des catastrophes de la Fédération internationale des
sociétés de la Croix-Rouge et du Croissant-Rouge (FICR) pour l'Asie-Pacifique, « et il fournit de nombreux efforts dans ce sens » [ http://www.ifrc.org/fr/ ].

En 2012, le pays le plus peuplé du monde, qui abrite plus de 1,3 milliard d'habitants, a subi 23 catastrophes naturelles, soit presque deux par mois, d'après le Centre de recherche sur l'épidémiologie des catastrophes (CRED) dont les statistiques montrent une tendance à la baisse du nombre de victimes au cours des dix dernières années [ http://www.cred.be/ ].

D'après le CRED, les catastrophes naturelles ont fait 771 victimes en 2012, contre une moyenne de 1 046 décès de 2002 à 2011, et le nombre moyen de personnes touchées est aussi en baisse.

La coordination

La plupart des efforts chinois sont axés sur le Comité national pour la réduction des risques de catastrophes (NCDR) qui coordonne 34 organismes incluant des ministères gouvernementaux, des administrations et la
Croix-Rouge chinoise. Ce réseau centralisé se retrouve également au niveau des autorités locales.

Le NCDR est responsable de tous les aspects de la réduction des effets des catastrophes et des secours, de l'alerte précoce à la reconstruction post-catastrophe. Il bénéficie des conseils d'une commission de plus de 100 spécialistes en gestion des catastrophes et travaille en étroite collaboration avec le Centre national de réduction des catastrophes en Chine (NDRCC), une organisation qui fournit un soutien technique et
informationnel, notamment une base de données nationale permettant aux départements des Affaires civiles d'enregistrer des précisions sur une catastrophe.

L'accent est mis sur la coopération et la coordination, particulièrement dans la réponse d'urgence qui est menée par le bureau de la sécurité publique, la police et l'armée, soutenus par la Croix-Rouge et d'autres
groupes de bénévoles.

Selon Mme Poon, le caractère de coordination du NCDR et l'intégration de la Croix-Rouge sont essentiels à la réussite de la RRC en Chine.

« C'est cette coordination qui fait la différence lorsqu'une catastrophe naturelle survient ; savoir qui fait quoi sur le terrain », a déclaré Mme Poon.

Une orientation claire

La stratégie chinoise en matière de RRC est portée par le plan d'ensemble national de prévention et de réduction des risques de catastrophes (2011-2015) qui définit les directives de développement, les missions
principales et les grands projets des opérations de RRC en Chine sur une période de cinq ans.

Le plan comprend la mise en place d'objectifs quantifiables et place la RRC au cour du portefeuille de développement étendu du gouvernement, ce qui est fondamental pour la réussite de la RRC d'après les spécialistes.

« En établissant des résultats quantifiables que le gouvernement cherche à atteindre, il est plus facile de déterminer l'étendue des ressources et la gamme des investissements nécessaires pour atteindre ces résultats », a déclaré Jerry Velasquez, coordonnateur régional du Bureau de prévention des catastrophes des Nations Unies (UNISDR) en Asie-Pacifique [ http://www.unisdr.org/asiapacific ].

Les autres enjeux du plan concernent l'alerte précoce qui relève de certains départements rattachés au NCDR, ainsi que le développement d'une surveillance tridimensionnelle par satellite. Un système d'alerte précoce national des tremblements de terre est prévu au cours des cinq prochaines années.

La stratégie en ouvre

Un système d'intervention post-catastrophe de quatre niveaux a été établi. Il est déclenché par le Conseil d'État, en consultation avec les ministres du gouvernement, en tenant compte de l'ampleur de la catastrophe, ainsi que des données et des rapports concernant la zone touchée.

Le 20 avril 2013, dans la province du Sichuan, au sud-ouest de la Chine, un séisme de magnitude 7 a déclenché le niveau 1 de ce plan, soit le plus haut niveau. Les équipes d'évacuation et de secours nationales et provinciales ont tout de suite été mobilisées [ http://reliefweb.int/map/china/asia-pacific-region-17-22-april-2013-natural-disasters-and-other-events-being-monitored ].

D'après le Bureau de la coordination des affaires humanitaires des Nations Unies (OCHA), 207 personnes ont été tuées, 11 500 ont été blessées et plus de 1,5 million de personnes ont été touchées dans 69 cantons [
http://reliefweb.int/sites/reliefweb.int/files/resources/Asia-Pacific%20Regi
on%2017%20-%2022%20April%2C%202013%2C%20Natural%20Disasters%20and%20Other%20
Events%20being%20monitored%20by%20the%20OCHA%20Regional%20Office%20for%20the

%20Asia-Pacific.pdf ].

Bien qu'il soit trop tôt pour une évaluation complète de la situation, les premiers rapports du CRED indiquent que la réponse a été rapide, car les secours sont arrivés sur place en quelques heures et 136 équipes médicales étaient opérationnelles dès le lendemain matin, renforcées par plus de 18 000 militaires et policiers.

Le plus fort séisme à avoir frappé la Chine ces dernières années, le 12 mai 2008, a eu lieu également dans le Sichuan, tuant plus de 80 000 personnes, dont des milliers d'enfants. Il avait déclenché une forte vague de
protestations après l'effondrement de bâtiments scolaires, dû à des constructions de mauvaise qualité, ainsi que des accusations de corruption.

« Certaines catastrophes, telles que les tremblements de terre, tuent beaucoup de gens, quel que soit leur niveau de préparation », a déclaré à IRIN la directrice du CRED, Debby Guha-Sapir. « L'important est la qualité de la réponse, et la réaction de la Chine après le tremblement de terre au Sichuan a été pratiquement exemplaire ».

Les victimes extraites des décombres du dernier tremblement de terre ont été accueillies dans une unité de soins intensifs, puis transférées dans un hôpital de première ligne.

« Les patients sont arrivés à l'hôpital très rapidement et leur taux de survie était très élevé », a déclaré Mme Guha-Sapir.

En plus des soins dispensés aux patients, les médecins ont gardé une approche scientifique en rédigeant des rapports qui allaient être utilisés plus tard par Mme Guha-Sapir et son équipe pour réaliser des études
post-catastrophe.

Des eaux troubles

Si la Chine est exemplaire en matière de secours en cas de tremblements de terre, les inondations restent sans doute la plus grande catastrophe à laquelle le pays doit faire face de façon récurrente. Les inondations
touchent en moyenne 100 millions de personnes par an et, l'an dernier, elles ont représenté 65 pour cent de toutes les pertes économiques liées aux catastrophes naturelles.

« En matière de gestion des inondations, une attention particulière doit être portée sur l'homme », a déclaré Mme Guha-Sapir.

L'un des facteurs est la taille des rivières en Chine et la présence de nombreuses populations dans les zones inondables, car le pays compte des dizaines de milliers de rivières.

Si la lutte contre les inondations à grande échelle a fait l'objet d'investissements de la part du gouvernement, les experts affirment qu'il reste encore à améliorer la réponse aux crues subites localisées, aux glissements de terrain et aux coulées de débris qui surviennent dans les zones reculées et sous-développées.

« Les crues subites représentaient deux tiers des décès liés aux inondations dans les années 1990 », a déclaré Liu Minquan de la faculté d'Économie de Pékin, et cette part est en augmentation ».

Des mesures s'imposent, notamment l'amélioration des prévisions météorologiques, l'augmentation des actions de prévention des risques et des plans d'évacuation auprès de la population locale, ainsi que des
investissements plus importants dans des infrastructures hydrauliques.

« Les investissements de la Chine dans les infrastructures hydrauliques ont été extrêmement faibles ces dernières années », a déclaré M. Liu. « Avant 1980, ces investissements représentaient environ sept pour cent de l'investissement total en infrastructures, et jusqu'à 15 pour cent certaines années, mais depuis 1981, ils ne représentent plus qu'un à trois pour cent
».

D'après les chiffres du gouvernement, la Chine a investi un total d'environ 48,6 milliards de dollars dans les infrastructures hydrauliques en 2012, et le Chinese Water Digitalization Service Report of 2013-2017 (rapport du Service de numérisation des réseaux hydrauliques chinois 2013-2017) prévoit une dépense de 64,8 milliards de dollars pour 2013.

En plus des nouvelles infrastructures, il est nécessaire d'investir dans l'amélioration des digues et des réservoirs d'eau existants. Ce mois-ci, le Centre d'État pour le contrôle des inondations et la lutte contre la
sécheresse en Chine a rapporté que près de 3,5 millions d'hectares de terres cultivées dans les provinces Yunnan, Gansu, Henan, Sichuan et Hubei souffraient de sécheresse, privant ainsi plusieurs millions de personnes d'eau potable.

Au cours des 60 dernières années, 87 000 réservoirs et 286 900 km de digues ont été construits », a déclaré M. Liu. « Cependant, la plupart l'ont été avant 1980 et les normes d'ingénierie n'étaient généralement pas au point ».

Mais la Chine s'efforce de remédier à ces problèmes.

« La Chine a beaucoup investi pour renforcer le contrôle des petites et moyennes rivières, pour renforcer les réservoirs d'eau non sécurisés, pour la prévention des catastrophes géologiques déclenchées par les inondations et pour l'étude globale de l'environnement écologique dans les zones sujettes aux catastrophes », a déclaré Wang Dongming, chercheur au NDRCC. « Au niveau communautaire, un programme est activé depuis 2008 grâce auquel des experts forment et aident les communautés locales à établir des plans
d'intervention d'urgence. Ils procèdent à des exercices de secours en cas de catastrophe et constituent leurs propres groupes de secours avec des bénévoles ».

L'après-Hyogo

En Chine, la prochaine Journée nationale de la réduction des catastrophes, le 12 mai, marquera le cinquième anniversaire du tremblement de terre de 2008 dans le Sichuan, l'occasion de souligner les efforts fournis en termes de RRC.

En 2012, le gouvernement chinois a investi environ 14 milliards de dollars dans la RRC et dans les opérations de secours. S'il est vrai que cet effort en matière de RRC est possible grâce à la solidité de son gouvernement centralisé et de son système bancaire, d'autres pays voisins, moins bien dotés et moins organisés que la Chine, peuvent s'en inspirer.

« Alors que le monde médite sur la suite à donner au Cadre d'action de Hyogo », a déclaré M. Velasquez, « nous devons examiner de près ce que font les pays comme la Chine pour réduire les risques de catastrophes et savoir ce qui fonctionne, mais aussi, et surtout, comment cela fonctionne » [ http://www.unisdr.org/we/coordinate/hfa ].

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